EQUIVOQUES D' UN VOYAGE

Publié le par Jean-Pierre Biondi

Le voyage à Washington est non seulement flatteur pour l' ego des présidents français mais aussi obligé pour l' heureux déroulement de leur septennat ou quinquennat. Négocier dans son bureau (ovale) en tête à tête avec le dirigeant de la première puissance mondiale est une consécration à laquelle nul, sauf de Gaulle, n' a voulu échapper. La plupart du temps, avouons-le, sans grand succès .

La visite d' Emmanuel Macron n' a pas démenti la règle. Cela pour une série de raisons que, peut-être, le jeune chef d' Etat n' a pas prises suffisamment en considération :

- il s' agissait d' une " visite d' Etat", c' est-à-dire d' un voyage dont la finalité est plutôt d' affirmer la relation amicale entre deux peuples que de discuter les problèmes de l' heure, relevant,eux, de la "visite de travail". Priorité donc est accordée là à l' aspect festif et démonstratif. En l' occurrence le mélange des genres créait une confusion qui n' était pas un choix américain.

- il est toujours peu prudent d' annoncer haut et clair ses intentions (pour la circonstance la volonté d' infléchir la position de l' interlocuteur sur le traité de non prolifération nucléaire avec l' Iran), ce qui est une manière de tenter de lui forcer la main en l' embarrassant diplomatiquement.

- l' ambiguïté laissant croire que le Français était également une sorte de Monsieur Europe que nul n' avait pourtant mandaté. Effet dont personne n' a été dupe.

Ni sur le traité, ni sur la présence militaire américaine au Moyen Orient, ni sur le réchauffement climatique, ni sur les mesures protectionnistes des USA, Macron n' a obtenu la moindre concession
.
La chancelière Merkel talonne le Français à la Maison Blanche. Trump ira fin juin en Angleterre. On mesurera alors la sincérité du copinage si généreusement déployé par l' Américain, car tant de singeries laissent penser que le pesant Donald s' est joué du sémillant Emmanuel. Ce n' est sans doute pas un dîner sur la Tour Eiffel et un défilé de 14 juillet qui peuvent suffire à modifier l' orientation de l' ultraconservatisme d' outre atlantique!

Trump s'est, en réalité, l' oeil goguenard, borné à un "grand-fraternalisme"  illustré par l' époussetage d' une pellicule de l' épaule de son pote (qu' il souhaitait "impeccable"). On ne peut mieux signifier qu' une grande puissance ne saurait se faire dicter sa conduite par une moyenne, fût-elle une alliée...

Il ne faudrait pas, pour l' Elysée, multiplier les erreurs d' interprétation du genre sans risquer de perdre crédit. Macron n' est pas l' Europe, et l' Europe, sans armée ni diplomatie communes, n' impressionne pas les Américains d' aujourd'hui. Moins en tout cas que les Chinois et les Russes. Le reste n' est que plaisanterie. 

 

Publié dans politique

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